Les personnes ayant des problèmes de santé se demandent si elles peuvent jeûner sans danger ou s'il est préférable de s’abstenir. C’est notamment le cas des maladies rénales qui figurent sur la liste des pathologies où le jeûne peut constituer un danger.
L’apport quotidien d'eau subit un changement important pendant le mois du Ramadan. Par conséquent, nos reins doivent fournir plus d'efforts pour concentrer l'urine et éliminer l'ensemble des déchets. Ils doivent alors être parfaitement fonctionnels pour faire face à l’insuffisance en apport d’eau. C’est pourquoi plusieurs personnes souffrant de maladies rénales ne sont pas autorisées à jeûner.
Les pathologies rénales chroniques les plus à risque
D’après Pr Amal Bourquia, spécialiste en néphrologie, dialyse et transplantation et présidente de l'association «Reins», ce sont surtout les malades avec des pathologies rénales chroniques qui posent problème. «On déconseille le jeûne au cours d’une insuffisance rénale chronique, car cela peut constituer un danger pour la vie des patients. Cependant, l’insuffisance rénale chronique modérée et stable peut permettre le jeûne, à condition d'une surveillance médicale continue. Le jeûne doit être interrompu en cas d’aggravation de la fonction rénale ou un mauvais retentissement sur l’état du patient», déclare au «Matin» Pr Bourquia. Et de préciser que «pour tous les autres types de néphropathie glomérulaire, interstitielle, ou vasculaire en phase aiguë de la maladie, le jeûne est interdit jusqu’à la guérison ou la stabilisation de la maladie.
Aussi, certaines maladies rénales héréditaires qui s’accompagnent d’une fuite urinaire obligatoire d’eau et de sel telles que les néphropathies interstitielles, polykystose rénale, acidoses tubulaires… les patients nécessitent une compensation régulière de cette perte et ne sont pas autorisés à jeûne». La néphrologue souligne, par ailleurs, que pour les néphropathies en rémission, le jeûne peut être autorisé sous surveillance médicale et adaptation des horaires de la prise de médicaments.
En revanche, les patients insuffisants rénaux en dialyse ne peuvent pas jeûner vu leur état général souvent altéré, surtout si le patient est âgé, anémique, hypertendu, ou souffre d’un risque cardio-vasculaire élevé.
S’agissant des patients porteurs de lithiases rénales, Pr Bourquia explique que le jeûne peut les pousser à se plaindre davantage de coliques néphrétiques. «Il est conseillé de voir le médecin traitant avant le mois sacré pour évaluer le risque lithogène encouru et, à ce propos, l’étude de la cristallerie, et la réalisation de bilan lithiasique sanguin et urinaire permettent d’évaluer le risque et de mettre en place les mesures préventives contre la récidive même dans le cas où le patient va observer le jeûne du Ramadan.
Les malades ne sont donc pas en interdiction absolue de jeûner. C’est généralement le médecin-néphrologue qui prend la décision au cas par cas», affirme la présidente de l’association «Reins». Cette dernière souligne également que les personnes ayant subi une transplantation rénale ne doivent pas jeûner la première année. Ensuite, tout dépend de leur état de santé et de la présence ou non de complications de même l'autorisation du jeûne est en fonction du type de l'immunosuppression et du nombre de prises journalières. Les transplantés sont donc appelés à suivre leur médecin traitant et à se plier à ses prescriptions.
Pr Bourquia insiste, en outre, sur l’importance de respecter les consignes du médecin lorsqu’il leur demande de ne pas jeûner. «En s’obstinant à jeûner, les patients risquent d’avoir des complications sévères et d’aggraver leur maladie. Le manque d’apport en eau peut aggraver certaines lésions tubulaires rénales avec risque de dégradation de leur fonction rénale. De même, lors d’une infection urinaire évolutive, la diminution du volume urinaire augmente le risque d’infection ou d’aggravation de l’infection urinaire surtout chez les sujets âgés et les patients présentant des facteurs de risque d’infection comme une malformation des voies urinaires ou des lithiases rénales», explique le médecin.
Source: Le Matin