D’importants changements seront apportés au système de santé, durant les prochaines années.
Une réforme nécessaire et urgente dont le ministre de la santé a donné les premiers fondements au conseil du gouvernement du mardi 20 avril. Parmi ces changements figure la levée des obstacles imposés par la loi 131.13, relative à l’exercice de la médecine, sur la pratique des médecins étrangers au Maroc. Le ministre avance que de nouvelles règles seront promulguées, s’appuyant sur le principe de l’égalité de traitement, entre les médecins marocains et leurs confrères étrangers.
Le médecin étranger pourra, ainsi, pratiquer sa profession, selon les mêmes conditions appliquées à ses confrères marocains et les médecins étrangers qui pratiquent, actuellement au Maroc.
La procédure actuelle est complexe
En effet, il existe, dans la loi 131-13, relative à l’exercice de la médecine, deux chapitres (III et VI), consacrés aux médecins étrangers.
Le chapitre VI réglemente « l’exercice de la profession de médecine par des médecins non-résidents au Maroc ». Ces derniers, peuvent être autorisés à exercer, exceptionnellement, dans les cas suivants pour une période dont le total n’excède pas 30 jours par an :
- soit dans un des centres hospitaliers régionaux ou universitaires, lorsque l’intervention présente un intérêt pour l’enseignement médical pratique et à la demande du directeur du centre concerné ;
- soit dans le secteur privé, lorsque la spécialité ou la technique médicale, objet de l’intervention ne se pratique pas au Maroc. Dans ce cas, la demande est introduite par le directeur de la clinique ou de l’établissement assimilé, au sein duquel le médecin concerné entend exercer. La liste de ces spécialités et techniques est fixée annuellement par voie réglementaire, après avis du conseil national ;
- soit dans le cadre de caravanes médicales, autorisées par l’autorité gouvernementale compétente.
Le chapitre III est, à lui, dédié « à l’exercice de la médecine par des médecins étrangers « . L’article 27 dispose : « aucun médecin étranger ne peut exercer aucun acte de la profession, à titre privé au Maroc, s’il n’y est autorisé, par l’autorité gouvernementale compétente, conformément, aux modalités fixées, par voie réglementaire et inscrit au tableau de l’Ordre, conformément aux dispositions du chapitre 2 du présent titre. Cette autorisation est accordée, au regard de la carte sanitaire et des schémas régionaux de l’offre de soins ».
Mais il y a des conditions supplémentaires détaillées, dans l’article 28. L’autorisation est accordée au médecin étranger qui remplit les conditions suivantes :
- Résider au Maroc, conformément aux textes législatifs et réglementaires, relatifs à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières ;
- être : soit ressortissant d’un Etat ayant conclu avec le Maroc un accord autorisant les médecins, ressortissants de chacun des deux Etats, à s’installer sur le territoire de l’autre Etat, pour y exercer la profession de la médecine ou applique le principe de réciprocité en la matière ; soit des étrangers mariés avec des ressortissants marocains, pendant une durée de 5 ans au moins ; soit né au Maroc et y ayant résidé de manière continue, pendant une durée de 10 ans, au moins ;
- être titulaire du diplôme de docteur en médecine délivré par l’une des facultés de médecine marocaines ou d’un titre ou diplôme d’un établissement étranger, conférant à son détenteur le droit d’exercer, dans le pays qui l’a délivré et reconnu équivalent au diplôme national, conformément aux dispositions réglementaires en vigueur ;
- n’avoir pas été condamné au Maroc ou à l’étranger, par une décision ayant acquis la force de la chose jugée, pour un crime ou un délit contre les personnes, l’ordre de la famille ou la moralité publique ;
- ne pas être inscrit à un Ordre des médecins étranger, ou justifier de sa radiation s’il y était inscrit et n’avoir fait l’objet d’aucune sanction disciplinaire ayant entraînée sa suspension de l’exercice de la profession ou sa radiation du tableau de l’ordre étranger sur lequel il était inscrit.
Il y a des préalables à mettre en place
Avec 1,65 personnel médical pour 1 000 habitants (contre un minimum requis de 4,45), le Maroc a un déficit de 97 161 personnes, dans le secteur de la santé dont 32.387 médecins et 64.774 infirmiers et techniciens.
Sur ce déficit global, le secteur public a besoin de 62 000 personnes dont 12 000 médecins et 50 000 infirmiers et techniciens.
Autant dire que le besoin est urgent, surtout que le chantier de la généralisation de la couverture sociale qui a pour objectif de couvrir 22 millions de personnes supplémentaires, va aggraver la pression sur le système de santé.
"Avant toute chose, il y a des préalables à mettre en place dont on ne peut pas se passer ", avance Dr Said Afif, président du Collège syndical des Médecins Spécialistes et président de la Fédération Nationale de la Santé.
« Donc, la première chose à faire, c’est de revoir le statut de la fonction publique de la santé, pour accorder des incitations au personnel de la santé, le gratifier et le valoriser. Cela permettra, aussi, de retenir nos jeunes médecins diplômés », poursuit le président de la FNS qui tient à rappeler que 14000 médecins marocains exercent à l’étranger. Sur les 2.200 diplômés annuellement, 600 partent à l’étranger.
« En parallèle, il faut renforcer la formation de base. Nous n’avons pas encore atteint l’objectif, fixé par gouvernement Jettou, visant à former 3.300 médecins par an. Il faut accélérer la cadence sur ce volet. Et insister, aussi, sur la formation médicale continue », ajoute Dr Afif.
« La base sur laquelle nous pouvons et devons compter, ce sont nos médecins marocains. Par la suite, on peut s’aider des compétences étrangères », insiste le président de la FNS.
Pour ce dernier, il est clair que la loi 131-13 et la loi 08-12 relative à l’ordre national des médecins, doivent être revues, qu’il faut revoir le statut de la fonction publique de santé, travailler sur la répartition régionale, fusionner les cartes sanitaires publiques et privées,… « Il y a beaucoup de choses à faire et pas assez de temps. Nous avons deux ans pour mener les réformes nécessaires », rappelle-t-il.
Source : Médias24